Il était une fois un peuple en noir

« La vaste demeure de mes grands-parents paternels, une sorte de manoir chinois de plain-pied en pierre, était un labyrinthe sombre et moite. Un mélange entêtant d’encens et d’herbes médicinales pour séniors stagnait dans les pièces closes, comme un souffle figé du passé. À l’opposé, la maison de mes grands-parents maternels, plus petite mais charmante, sur pilotis, était bien exposée, baignée de lumière et largement aérée. Ses grandes fenêtres laissaient entrer le soleil et l’air. Elle était pleine de vie, entourée d’un jardin fleuri avec un grand potager au fond. C’est là, enfant, que je passais la plupart de mon temps, au rythme des jeux avec mes amis. » RokaKaong, village paisible d’un Cambodge méconnu. En 1961, l’enfance douce et insouciante de Sâmreth, bercée par les divinités de la nature et l’amour familial, s’écoule paisiblement. Mais cette harmonie vole en éclats avec la révolution idéologique, la guerre et les atrocités d’un génocide ignoré. Cette saga familiale déchirante s’étend sur trois décennies. De son village natal à son arrivée en France (en août 1975), puis son retour au Cambodge sous le régime de Pol Pot (jusqu’à fin 1978), Sâmreth nous livre un témoignage autobiographique poignant. Il confronte à l’absurdité de la violence et questionne notre humanité. À travers son histoire, un peuple se dévoile, portant les cicatrices d’un génocide à l’aube du 50e anniversaire de la chute de Phnom Penh, le 17 avril 2025. Ce récit inédit et bouleversant, empreint d’humour, de tendresse et de sensualité, d’une remarquable précision, puise dans les histoires et légendes khmères. Un livre poignant sur la résilience d’un peuple, qui marquera durablement.