L’oeuvre de Pascal Quignard, après presque 30 ans de recherche et d’explorations continuelles, avec les larges échappées de l’oeuvre narrative, peut sembler trop complexe, trop diverse pour être abordée globalement. Et son plus récent développement, la quête et les infinies variations du très riche projet Dernier Royaume, dont un livre de plus paraît ces jours-ci, n’est-il pas une sorte de somme qui la rassemble et la résume ? Mais pour chacun de nous, et la dette que nous avons à Pascal Quignard, n’est-il pas temps de faire le point, tenter non pas d’enfermer l’oeuvre dans une construction globale, mais l’appréhender dans ses mouvements de naissance, ses contraintes et nécessités, et ces quelques racines résistantes qui donnent à l’ensemble une si rare cohérence ? La force du travail de Benoît Vincent, c’est d’abord une relecture serrée, attentive, de l’ensemble des 40 Petits traités. Moi-même, et qu’est-ce qu’il compte, Pascal Quignard, dans mes lectures, je les avais lus de façon dispersée, au gré des rencontres, des accumulations. J’avais négligé aussi qu’après son Prix Goncourt Gallimard avait accepté de les rassembler en deux gros tomes Folio, en permettant la lecture unique, la construction d’un seul ouvrage, ce qui était de toute façon le projet initial... Alors, ces dernières semaines, au long de la préparation de cette étude de Benoît Vincent pour l’édition numérique, j’ai effectué moi aussi cette lecture globale, continue des Petits traités... Toutes les figures de l’oeuvre sont là, elles y sont en germe, comme ne figures parfaitement tracées, et l’art de Quignard, lorsqu’il part en roman ou reprend d’autres figures, est souvent de simplement greffer ce germe ou cette figure. Alors, toutes ces figures de l’effroi, du ventre et du sexe, de la notion de mythe, ou celle de maison, ou de l’eau, ou du froid, viennent peu à peu s’assembler, donnant comme une vision en relief de l’oeuvre, un large mouvement de gestation, parce que l’exigence, elle, est unique. Mais, dans les Petits traités, ce qui concerne le livre, la bibliothèque, la page, l’étude, et jusqu’à la lettre même (le e, le z), le fait même de parler ou d’écrire (dans le rapport à la voix, à la mort), la mémoire et le risque, sont l’arborescence principale. Même, ce qui ne regarde en rien Pascal Quignard, alors que nous abordons une phase essentielle de secousse globale de tous ces mots, dans la mutation Internet, l’urgence de lire ces Traités pour refonder ces mots dans leur propre origine, leur complexité. Le parcours de Benoît Vincent est exemplaire, en ce qu’il redouble dans son rapport à l’oeuvre en développement de Pascal Quignard le rapport que lui-même entretient à ces étranges textes qu’il nous fait revivre, plaçant en avant l’énigme de la langue. A lire en continu ce voyage de 300 pages dans l’oeuvre de Pascal Quignard, c’est à la fois mettre à jour et scruter la part essentielle d’invention qui gît dans la structure même, mais c’est la plus belle introduction à tous les chatoiements et bifurcations d’un travail continu, qui ne s’est jamais interdit les traversées les plus brutales, les plus surprenantes. Bien sûr, en double cliquant sur l’icône ci-dessus, nous vous proposons de visualiser un extrait de 50 pages. Mais lire ce texte en version intégrale sur notre feuilletoir, c’est avoir accès à la recherche plein texte qui peut faire de l’étude de Benoît Vincent un outil fabuleux pour tous les quignardiens : une recherche thématique pour n’importe quel concept vous permettra de remonter aux textes de Pascal Quignard qui les utilisent. En mettant en ligne cette étude, les remerciements iraient à la fois à Benoît Vincent et à Pascal Quignard lui-même. FB
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